Notre Aveuglante Lâcheté

Au moment où les terrasses s’ouvrent de nouveau, où les spectacles retrouvent leurs habitués, la violence des échanges sur la place publique, entre citoyens, entre hommes politiques est montée d’un cran que la gifle présidentielle n’a fait qu’illustrer de manière éclatante.

Mr Macron, d’ailleurs, devrait s’interroger sur sa politique néolibérale et son style présidentiel qui a déjà sur les bras les gilets jaunes et la désespérance lisible dans ces soulèvements populaires. La violence néolibérale parfois fait retour, même si la main gifleuse de lundi dernier était celle d’un fasciste.
La montée des invectives où l’origine des individus menacés est souvent évoquée, l’envie d’en découdre planent de plus en plus dans notre société. Il y a comme une ambiance pré-pogromiste qui n’augure rien de bon. Beaucoup d’intellectuels évoquent les années 1930-1940 pour tenter de se figurer notre époque et transmettre ce qu’il y a d’inquiétant dans la période que nous vivons.

La pandémie nous a tous intimé « l’ordre de rester à bonne distance les uns les autres « affaiblissant quasi mécaniquement le lien social, celui-ci étant devenu « suspect » et possiblement infectant. La vaccination étant le meilleur moyen de juguler la pandémie, voire de la faire disparaître, nous avons, pour beaucoup, plongé  » bras tendu » vers l’aiguille salvatrice. La perspective d’en finir avec la bestiole ovidienne a provoqué chez nos concitoyens une envie de liberté, lit-on dans la presse, de donner libre court à nos désirs de consommer, sorte de fête maniaque poste virale comme si l’on voulait se persuader que tout cela ne fera que passer dans quelques semaines, facilitant ainsi l’oubli.

Cette euphorie fait peur car les virages politiques qui s’annoncent font craindre que l’extrême droitisation de la société soit bien en marche. Le citoyen se démasque avec joie et soulagement alors que l’extrême droite violente récupère ce masque tombé pour avancer, tel le cheval de Troie, ces funestes thématiques du grand remplacement, de la menace sur la « vraie » France etc, etc..

Le pays semble vouloir détourner ses yeux de l’autre virus, le variant fasciste, très dangereux celui-là, alors que les partis de gauches sont depuis longtemps en réanimation, sans le savoir, et que les républicains donnent le sentiment de ne plus y croire eux-mêmes.
Nous devons rester vigilants, interpeller notre entourage, les hommes et femmes politiques. La vaccination contre le virus « extrême droite fascisant » et ses duplications, royalistes, identitaires n’existe pas. Seuls la parole et l’évocation de ces mouvements de haine de l’autre dans l’Histoire humaine peuvent mobiliser nos contemporains. Pour cela il est nécessaire d’en faire état partout où nous nous trouvons. Cette charge virale brune est mortelle pour la démocratie. Qu’on se le dise et redise.

Emile Rafowicz