Le Climat, la Biodiversité…et la COP26

Lors de la Conférence de Paris en 2015, la COP21, des engagements fermes ont été pris. Où en sommes-nous ? Alors que des tornades, des inondations, des sécheresses, des désertifications, des émigrations climatiques se développent, que des citoyens exigent des actions fortes, les dirigeants du monde nous présentent des incantations, des rafistolages. La COP26 sera-t-elle encore celle des bonnes intentions ? Assez !!!

La COP26 a lieu ce 31 octobre 2021 à Glasgow. La jeunesse s’impatiente de voir des actions vigoureuses prises contre le réchauffement climatique, la sauvegarde – de ce qu’il en reste – de la biodiversité. L’heure est critique. Les fondements écologiques qui sous-tendent notre planète et nos économies sont en danger.

Lorsque Greta Thunberg s’exaspère et clame tout fort qu’elle en a assez des Bla Bla Bla, elle a raison. En effet, ‟depuis 1995, les pays liés par la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) n’ont manqué qu’une seule conférence, celle de l’année de la pandémie de 2020. Ces COPs peuvent produire des plans d’action (Bali, 2007), des mandats (Berlin, 1995), des protocoles (Kyoto, 1997), des plateformes (Durban, 2011), des ruptures acrimonieuses (Copenhague, 2009) et des accords (Paris, 2015). Mais l’augmentation de la teneur en gaz à effet de serre de l’atmosphère et le réchauffement climatique qui en découle se poursuivent malgré eux, même si, comme souvent, ils sont présentés comme la dernière chance pour le monde‟ comme l’écrit le magazine libéral britannique The Economist du samedi 30 Octobre 2021. Rien ne semble bouger alors que les émissions mondiales augmentent comme le suggère le graphique ci-dessous (source The Global Risks Report 2021 du Forum Economique Mondial) :

Evolution Globale des Emissions à Effet de Serre

Les émissions mondiales de CO2 ont chuté de 9 % au cours du premier semestre de 2020, lorsque le COVID-19 a contraint la plupart des économies à s’arrêter pendant des semaines. Une baisse similaire est nécessaire chaque année pendant la prochaine décennie pour maintenir les progrès réalisés en vue de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C et éviter les pires effets du changement climatique.

L’heure est aux actes et non aux atermoiements ou aux calculs financiers sordides. La jeunesse, les écoféministes(*), les peuples indigènes et les paysans occupent l’espace des contestations et confirment leur rôle moteur. L’éco-anxiété a fait éclore d’autres réseaux activistes orientés vers l’action, principalement dans les pays dits ‟développés‟.

Comment vont réagir les pays producteurs de carbone et ceux du tiers-monde ? Quelles garanties auront-ils de la part des pays riches pour accompagner leur transition ? Comment aider à l’innovation, à l’investissement dans les énergies renouvelables ? Quelles incitations mettre en place ? La cause de Greta Thunberg est loin d’être entendue tant les intérêts sont divergents au niveau des Nations et des grands conglomérats financiers mondiaux. Les capitalistes productivistes voudront toujours s’imposer.

La biodiversité est une autre préoccupation : le rapport 2020 du Forum Economique Mondial sur les risques mondiaux classe la perte de biodiversité et l’effondrement des écosystèmes parmi les cinq principaux risques en termes de probabilité et d’impact pour les dix prochaines années. L’évolution de ce risque sur les trois dernières années est croissant comme le montre ce graphique :

La Carte des Risques 2020 et l’évolution du risque de perte de biodiversité au cours des trois dernières années – WEF 2020

Ce rapport a identifié, au cours des cinq dernières années, la perte de biodiversité et l’effondrement des écosystèmes comme un risque mondial de niveau ‟moyen‟ à ‟élevé‟ en termes d’impact et de probabilité. C’est le résultat d’une enquête exhaustive sur la perception des risques mondiaux, menée auprès d’une communauté mondiale d’entreprises, de gouvernements et de la société civile. Pour la première fois, les cinq principaux risques mondiaux proviennent d’une seule catégorie : l’environnement. On remarquera dans la table des risques ci-dessus l’accélération vertigineuse de l’effondrement de la biodiversité. Les événements extrêmes, les défaillances des actions sur le climat et les crises de l’eau restent, sans conteste, des risques majeurs comme l’atteste ce graphique.

Les modes de production et de consommation actuels, l’utilisation des terres et l’urbanisation, la dynamique des populations, le commerce, l’industrie et les modèles de gouvernement sont à l’origine de cette perte, ce qui appelle à une transformation radicale de la relation de l’humanité avec la nature.

Ainsi les efforts ne doivent pas seulement porter sur l’atténuation les risques associés au changement climatique mais aussi à une prise en compte vigoureuse des risques liés à la nature. La science du système terrestre nous montre comment le changement climatique et la destruction de la biodiversité sont inextricablement liés.

Etats, politiques et investisseurs devraient être à l’écoute de ce que leur révèlent les activistes, les ONG sur l’impact de ce risque. Les recherches du Forum Economique Mondial ‟montrent que 44 000 milliards de dollars de valeur économique générée – plus de la moitié du PIB mondial total – dépendent modérément ou fortement de la nature et de ses services et sont donc exposés à la perte de nature. Ensemble, les trois principaux secteurs fortement dépendants de la nature génèrent près de 8 000 milliards de dollars de valeur ajoutée brute (VAB) : la construction (4 000 milliards de dollars), l’agriculture (2 500 milliards de dollars) et l’alimentation et les boissons (1 400 milliards de dollars). Cela représente environ deux fois la taille de l’économie allemande‟.

Jamais l’antagonisme absolu entre l’accumulation capitaliste et les limites de la planète n’a été aussi visible. Il menace directement la survie physique de centaines de millions d’êtres humains et condamne les autres (et leurs enfants) à vivre dans un monde dévasté, à la biodiversité effondrée.

La COP26 devra donc répondre à des questions qui restent encore sans réponse. Pour atteindre les objectifs de Paris, il faudra retirer le dioxyde de carbone de l’atmosphère : qui s’en chargera ? Et qui paiera ? Comment respecter la trajectoire de réductions d’émissions nécessaires pour rester sous 1,5 °C ? Comment éviter la catastrophe qui vient si on continue le Bla bla bla dénoncé par Greta Thunberg ?

La jeunesse exige un monde où la prospérité à long terme pour tous devient possible. Comment le lui garantir ? La COP26 sera-t-elle la énième déception ?

En France plus particulièrement, qu’offrent donc tous les présidentiables de 2022 à cette question ? Nous voyons éclore des promesses ‟ambitieuses‟ mais pour quoi faire ? Verdir l’économie par les lois du marché ? Introduire des mini-réacteurs nucléaires pour passer la transition vers des renouvelables ? Et nous persuader que la situation est sous contrôle, comme si l’histoire du nucléaire n’avait pas connu Three Miles Islands, Tchernobyl ou Fukushima, et quid des déchets ? Quelle planification écologique publique proposent-ils ? Quel niveau d’investissements publics et quelle recherche publique créeront ils (l’actuelle recherche ne représente que 2,2% du PIB !) ? Et quelle authentique participation citoyenne mettront-ils en place (pas pour l’abuser comme celle de la convention citoyenne) ?

Abder Seridji

(*) : Le courant écoféministe considère qu’il existe des similitudes et des causes communes entre les systèmes de domination et d’oppression des femmes par les hommes et les systèmes de surexploitation de la nature par les humains entraînant le dérèglement climatique et le saccage des écosystèmes.

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