Le Déni

Que les dirigeants soient arrogants, élitistes, autistes aux problèmes que leur politique génère, soit ! Que dire de l'indolence et l'accoutumance de quelques classes sociales à l'orage qui gronde et qu'elles refusent de voir ?

“Don’t look up”, le film nextflixien qui a secoué le monde, a semble-t-il initié un mouvement de réflexions inattendues des citoyens concernant l’extension du déni dans la fabrication des pensées de nos gouvernants.


Tant dans le domaine de l’écologie, dans le domaine de la santé que dans le domaine de la géopolitique récente, les efforts de nos gouvernants se portent sur une vision du monde qui doit correspondre à leurs fantasmes quitte à ignorer les alertes émises par la fine fleur des savants.


Le monde dans lequel ces dirigeants s’orientent doit nécessairement être réglé par des accords commerciaux et dont les buts restent les profits engrangés par un petits nombre de privilégiés proches du pouvoir, ce que l’économiste Thomas Piketty appelle la kleptocratie.


Dans ce monde globalisé ne règnerait que les préceptes de l’économie de marché, voire de l’économétrie de marché, sans autre forme d’idéologie. Une économie réglée par les mathématiques qui va jusqu’à récuser, dénier, ce fait d’évidence qu‘elle est l’idéologie même d’aujourd’hui, et se voulant la seule recevable. On l’appelle le néo-libéralisme.


Dans cette vision du monde, la destruction est pour les autres, les pays dont on soustrait les richesses, la vie de plaisirs pour les puissances maîtresses du monde. La mort à petit feu pour les premiers, pour les secondes La belle vie « ad vitam aeternam”.


A force de vouloir diriger un pays comme une « start up nation”, c’est à dire comme une entreprise sans passé, la politique et son histoire perd de sa pertinence. Nos VRP au pouvoir poursuivent leur déni pour que la machine à cash continue à fonctionner, au détriment des 99% des citoyens qui, eux, ne font pas partie des kleptocrates recensés.


La guerre à nos portes nous réveille de cette léthargique musique dans laquelle nous baignons (proche de celle que Kaa fait entendre à Mowgli dans ”le Livre de la Jungle ») depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Le mythe des trente glorieuses pourrait avoir été un des anesthésiants les plus puissants qu’on ait fabriqué pour nous hypnotiser. Notre complicité passive avec ce système de pensées, qui a favorisé l’expansion du néo-libéralisme, nous a fait avaler chaque cuillerée avec « délectation”, autre façon de nommer ‟l’empoisonnement” idéologique dont nous vivons aujourd’hui les effets. Les mouvements citoyens qui se forment aujourd’hui sont, espérons le, les mouvements de réveil salutaire qu’il faut favoriser pour sortir de ce si long sommeil.


Clausewitz a eu cette formule restée célèbre : ‟La guerre est une simple continuation de la politique par d’autres moyens”. On devrait ajouter en paraphrasant ce général stratège devenu philosophe de la guerre : la politique est la continuation de la guerre par d’autres moyens, y compris dans ses horreurs, ses souffrances et le reniement des valeurs humaines.

Emile Rafowicz

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