2022, A Votre Santé ?

Face à une situation de crise jamais connue, il n'est plus certain que demain notre système de soins puisse répondre à l'exigence de ce que doit être un vrai service public hospitalier.

Oui, souhaitons-nous une bonne santé et surtout une santé solide parce que si on vient à la perdre la belle santé, il n’est plus certain que demain notre système de soins puisse répondre à l’exigence de ce que doit être un vrai service public hospitalier : « garantir à chaque citoyen dans des conditions d’égalité, quels que soient son niveau de revenu et son lieu d’habitation, l’accès à l’ensemble des biens et des services jugés fondamentaux ».

En 10 /20 ans, de politique d’austérité en politique d’austérité, l’hôpital est miné de l’intérieur. Ce gouvernement le savait, les personnels soignants n’ont cessé de le lui rappeler tout au long de ces cinq dernières années. Grèves, tribunes, rappels alarmistes, rien n’y a fait. Les lits ont continué de se fermer, les personnels de s’épuiser ! Le/la Covid-19 n’a pas interrompu la réduction inexorable des capacités hospitalières sur le plan humain et matériel, il/elle a juste mis en lumière un système essoufflé et en a accéléré son déclin. En toile de fond la même politique délétère est menée. Comme le rappelle Marc Blancher, chef de service des urgences de Grenoble :

« La vraie insécurité, ce n’est pas celle dont parlent aujourd’hui les politiques. Ce serait que le système de santé s’effondre. Ce n’est pas encore le cataclysme, mais on n’en est plus loin. »  (1). L’insécurité ne vient pas de l’extérieur, des citoyens, mais de l’intérieur, de la gestion de nos gouvernants.

J’enrage d’être spectatrice de ce gâchis, alors j’y vais de ma petite voix et aimerais vous trouver à mes côtés pour exiger que ce qui suit soit la règle et non pas l’exception.

Un lundi de novembre à Paris !

18h, la tête me tourne, une grande fatigue, je me sens faiblir. J’avale un en-cas. Le malaise augmente, la tête tourne, en l’espace d’un instant je file aux toilettes et ne garde rien de ce que je viens d’avaler. En sortant, une forte douleur à la poitrine. Je suis cardiaque et bien sûr, la douleur réveille la mémoire du jour où j’ai découvert ce qu’infarctus voulait dire. Moment de panique, je m’allonge, prise de tension, une fois, deux fois, trois. Elle monte trop, la douleur dans la poitrine persiste avec la même intensité !!  Une demi-heure passe, la douleur ne s’atténue pas. Coup de téléphone au service de la Pitié-Salpêtrière, l’hôpital où je suis suivie, pas d’hésitation répond l’interlocutrice, appel au samu qui appelle les pompiers.

Vingt minutes plus tard, rentrent dans la chambre, trois pompiers, 2 médecins, un infirmier avec toutes les machines nécessaires aux premiers soins. Tous autour de moi, sont attentifs, prévenants, précis dans leurs questions et calmes toujours. Bien qu’ils ne soient pas alarmistes ils préfèrent m’envoyer aux urgences.

Après quelques minutes dans l’ambulance, on roule vers les urgences de l’Hôpital de la Salpêtrière. Une place s’est libérée !

20h, arrivée à la Pitié-Salpêtrière, installation en salle d’Urgence Vitale.  Un espace plutôt calme ou déjà 2 personnes attendent derrière des paravents. Infirmières, infirmiers, médecins se succèdent, attentifs à ma douleur, même si à priori, tous les examens qu’ils effectuent ne sont pas alarmants.

Comme la douleur persiste, ils restent vigilants !

J’ai le temps de remarquer la jeunesse de toute l’équipe soignante qui s’affaire ce soir-là, elle ne me semble pas excéder une moyenne d’âge de 30 ans.

Les heures s’égrènent, la salle se vide, le petit bout de jeune femme en charge de la salle où je me trouve, du haut de ses 25 ans, sous son air de petite fille, répond aux demandes en cascades avec précision, rapidité et ne perd, toute cette nuit, ni son efficacité, ni sa bienveillance.

3 heures 40, la jeune médecin revient, les examens de révèlent rien, je quitte l’hôpital.

Je n’ai pas eu à régler quoique ce soit !

Voilà ce que peut encore offrir l’hôpital aujourd’hui mais jusque quand ?! Tous ces personnels ne m’ont rien donné à voir de leurs conditions de travail dégradées, rien de leur fatigue, rien de leur désarroi.

Voilà ce sur quoi tient encore un système de soin exsangue, des femmes et des hommes qui par humanité, par éthique, par dévouement, par professionnalisme, gardent un semblant de tenue et font face sans rien laisser paraître à ceux qu’ils ont à prendre en charge, les malades !

Oui, l’hôpital s’effondre doucement, inexorablement, et le gouvernement avec cynisme tourne les yeux, et préfère marteler des discours iniques et culpabilisants sur les comportements des citoyens qui seraient, pour lui, seuls responsables de cette décomposition. Depuis deux ans que le virus Coronavirus mute et désorganise notre vie en société, les pouvoirs publics continuent de fonctionner en réaction plutôt qu’en anticipation. Aucunes nouvelles politiques pour enrayer l’épuisement des équipes, leur insatisfaction et les départs en masse. Les cris d’alarme des personnels soignants se perdent dans les couloirs de l’Elysée dans un silence assourdissant ! 

Toujours pas de moratoire sur les fermetures de lits. Rien pour redynamiser un système de recherche laissé en jachère depuis des années. Il vaut mieux laisser s’essouffler l’hôpital public et produire d’énormes écrans de fumées avec des polémiques sur la pandémie pour ne pas le voire s’asphyxier !

C’est purement et simplement de la non-assistance d’Hôpital en danger.

Alors, oui, A Votre Santé, Mesdames, Messieurs… Oui, mais laquelle ? Vous avez une campagne présidentielle pour vous en rappeler.

Quelques évidences qu’il est bon de rappeler. Vous le savez évidemment, mais ça va mieux en le disant :

  • Les Hôpitaux et Cliniques sont financés à 90% par la Sécurité sociale, le solde du financement étant assuré par les patients eux-mêmes ou leur assurance complémentaire Santé.
  •  Le régime général de sécurité sociale est financé à environ 80 % par des cotisations et contributions assises sur les rémunérations.

https://www.mediapart.fr/journal/france/010122/l-hopital-de-grenoble-est-ce-qu-il-faut-laisser-tomber-les-gens-pour-mieux-les-aider

Véronique Barnet

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